Elton Mokolo : “Javi Gracia peut comprendre l’environnement de Valence”

Valencia-Sports a pu s’entretenir avec Elton Mokolo. Le journaliste sportif a analysé avec nous l’actualité récente du club de Valence : La gestion de Peter Lim, les départs d’Alemany et de Marcelino, la nomination Javi Gracia.
Bonjour Elton. Merci de nous accorder cet entretien. As-tu été surpris de la décision de Lim de licencier de Marcelino ainsi que de démanteler la direction sportive ?
– Oui bien évidemment, cette décision m’a surpris car Valence avait une stabilité très intéressante avec Alemany, Longoria et Marcelino. Elle a permis d’obtenir deux qualifications en Ligue des Champions, ce qui n’était plus arrivé depuis la période Emery, ainsi qu’une Copa del Rey pour l’année du centenaire. Rien n’indiquait que tout ce beau monde allait partir pour des décisions qui vont au-delà du sportif. Et là est le problème, car ce groupe-là doit être jugé sur le sportif, surtout Marcelino. Les voir partir m’a beaucoup surpris et cela a amené de l’instabilité. Une instabilité propre à Valence ces dernières années.
Certains estiment que la période de Marcelino à Valence touchait à sa fin, que le jeu n’était pas très enthousiasmant et que les qualifications se résumaient plus à une faible concurrence qu’à de bonnes performances de l’équipe. Quel est ton avis sur la question ?
– C’est une question très intéressante. Quand je parle de résultats, je m’intéresse à la finalité. Mais à côté de ça, il y a un processus. Et c’est là que je peux comprendre certains avis. Au club des 5, on a énormément parlé de Valence. On ne peut pas dire que le jeu de Marcelino, c’était la grande joie. Marcelino était un coach décrié. Donc sur l’idée de processus, je peux comprendre. Il a terminé sa dernière saison avec une soixantaine de points, c’est pas non plus énorme. Maintenant, il aurait fallu que le départ de Marcelino soit accompagné d’un changement d’entraineur qualitatif. Je ne suis pas persuadé que, quand tu prends Celades, tu gagnes en qualité. J’aurais compris s’il y avait eu un changement d’entraineur avec un apport qualitatif. Mais Celades, je ne pense pas que ce soit vraiment qualitatif. Il n’a pas une expérience significative dans le coaching. De plus, on sait très bien que Valence est un environnement très difficile. Il aurait fallu prendre un coach aguerri après Marcelino.
Très proche de la sortie en décembre 2019, Marcelino est finalement confirmé par la direction. Les objectifs sont fixés conjointement en pré-saison mais Meriton change d’avis par la suite. Marcelino n’a pas apprécié ce changement brutal de cap.
– Je suis partisan des hommes qui mènent leur projet jusqu’au bout dès lors qu’ils ont des résultats. Mais je peux aussi comprendre que Peter Lim dise à un moment qu’il y a un cap à prendre, malgré le travail et l’organisation en vase clos du trio Alemany/Logoria/Marcelino. Il y aussi la vision entrepreneuriale de Lim à prendre en compte.
En toute fin de mercato estival, Valence a failli vendre Rodrigo sans possibilité de le remplacer. Marcelino s’y était fermement opposé. Quel est ton avis sur le sujet ?
– Il faut aussi tenir compte de la logique économique. Peter Lim ne s’en est jamais caché, il y a une politique de revente prévue. Les deux dernières saisons, il n’y a pas eu de vente significative. C’était pour ainsi dire une des derniers moments pour vendre vendre Rodrigo, qui allait sur ses 28 ans. D’autant plus que tu récupérais 60 millions et que tu rentrais dans tes frais. C’est pas non plus comme si avec Maxi Gomez, Gameiro, Guedes, qui peut évoluer sur le front de l’attaque, et Kang-In tu étais dépareillé. C’était déjà mon raisonnement à ce moment-là.
Le timing était quand même difficilement défendable d’un point de vue sportif…
– Evidemment, pour la logique sportive, il aurait fallu le vendre en juillet. Une vente en toute fin de mercato ne suivait aucune logique sportive. Le timing dépend aussi de l’offre et de la demande. A partir du moment où trois parties sont impliquées, il faut aussi tenir compte de l’Atletico Madrid. Mais deux jours avant la fin du mercato, cela reste très compliqué. Sa vente aurait du être actée en juillet ou début août. L’enseignement à tirer des départs d’Alemany et de Marcelino est la présence de différents points de vue sur le modèle sportif. Du côté de Alemany et de Marcelino, on est pragmatique et dans une logique de progression, notamment pour rattraper le retard sur l’Atleti de Simeone. Du côté de Lim, il fallait vendre pour rentrer dans ses frais. Ceci reste une problématique présente dans de nombreux de clubs quand même.

Rodrigo Moreno lors de son but face à Chelsea / Crédits photo : Valenciacf.com
Quelle note sur 10 donnerais-tu à Peter Lim depuis qu’il est à Valence ?
– Question très compliquée, il faut regarder sur le panorama européen. De plus en plus d’investisseurs étrangers sont capables d’arriver dans un club et de repartir aussi rapidement. Il existe de grandes variations de projet. Je vais rehausser la note grâce aux deux qualifications en Champions League et à la Copa del Rey pour donner un 6 sur 10. Le club a pu capitaliser là-dessus, on a vu un Valence protagoniste en Liga. Rien que pour ça, j’ai envie de garder des beaux souvenirs. Après, il y a aussi eu les périodes de vaches maigres avec Voro, Prandelli, Neville, Ayestaran, Cela a été très laborieux à ce niveau-là. Je mettrais donc un 6.
Je te trouve généreux. Le mérite de Lim est d’avoir laissé des gens qui connaissent le foot.
– C’est vrai, mais il faut aussi en tenir compte. Enormément de propriétaires font de l’ interventionnisme et qui partes du principe ” c’est moi qui paye, j’ai mon mot à dire”. Peter Lim est dans cette logique, mais il a également su déléguer à bon escient avec l’arrivée d’Alemany qui entraîne celle de Marcelino. J’émets toujours des réserves sur les investisseurs étrangers éloignés du centre décisionnel ceci dit. Faire des aller-retours à Singapour et passer des jours dans un avion pour se voir signifier son renvoi, c’est regrettable.
On reproche aussi à l’actionnaire majoritaire de ne pas être présent, d’être trop distant.
– La composante émotionnelle dans les clubs espagnols est très présente. Les SA (ndlr : les sociétés anonymes) sont très récentes en Espagne, elles n’existent que depuis une trentaine d’années. La culture entrepreneuriale qui s’accompagne d’une logique de trading avec un propriétaire omnipotent mais absent en ville n’est pas quelque chose de naturel en Espagne.
Es-tu convaincu par l’arrivée de Javi Gracia pour nouveau projet “low cost” du club ?
– J’aime l’idée de reprendre Gracia, car c’est dans la continuité des coachs espagnols qui ont apporté quelque chose de positif à Valence (Emery, Benitez, Marcelino). Gracia est une figure respectée en Espagne avec des passages à Almeria, Osasuna et surtout à Malaga. Gracia a d’ailleurs déjà travaillé dans des environnements semblables à celui de Valence ; il a travaillé dans le Malaga qui voulait se redéfinir sur la scène espagnole et européenne, avec la fin que l’on connait. Il a aussi connu le Rubin Kazan, dont l’important pour le république du Tatarstan est à souligner, le Watford de Gino Pozzo avec cette formule de trading omniprésente. Javi Gracia est un habitué des fortes têtes au-dessus de lui et a quand même réussi à bien composer. Gracia est pour moi capable de travailler ainsi que d’entendre et de comprendre le contexte, et c’est très primordial selon moi. Valence a connu des coachs qui maitrisaient les aspects tactique et compétitif mais qui comprenaient moins bien l’environnement. Gracia pourra amener cette continuité.
A Valence, on a peur de se retrouver avec un pantin…
– Non, je ne pense pas que ce soit le cas. J’aime à penser que Gracia arrive à Valence alors qu’il n’était pas dans un besoin impérieux de trouver un poste. Je ne pense pas qu’il soit là pour faire énormément de compris. Evidemment, il va devoir composer avec la présence de Peter Lim, mais pas de là à voir son équipe réduite qualitativement. Il y a quand même un objectif de retrouver l’Europe dans un premier temps, il faudra donc une équipe compétitive.
Ton avis sur la vente de Ferran Torres à Manchester City ?
– Ferran Torres est un joueur de la cantera qui est amené, si tout va bien, à faire de très bonnes choses au plus haut niveau. Il aurait pu avoir un rôle plus important compte tenu de la restructuration de l’effectif. L’ailier s’imaginait d’ailleurs capitaine de Valence. Il aurait fallu installer Ferran Torres dans la durée. Mais il y a eu la problématique vis-à-vis de son contrat. Des complications sont intervenues au niveau de sa prolongation avec notamment la question de son rôle dans la durée. Peter Lim a reçu une offre, il a vendu.
Merci à Elton (@EltoMok) pour sa disponibilité.
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@MichelCampos91 @LebrunAdrien
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