Interview / Romain Molina : “C’est dramatique parce qu’on parle de Valence”

Ecrivain indépendant et journaliste, Romain Molina décrypte le monde du football et ses (nombreux) à-côtés. Valencia-Sports s’est entretenu en exclusivité avec lui au sujet de la situation du club de Valence et de son actionnaire majoritaire, Peter Lim.
Au programme : relations avec Jorge Mendes, comparaison avec la descente en enfer de Malaga et admiration pour David Silva.
Bonjour Romain, peux-tu te présenter brièvement pour les lecteurs ne te connaissant pas.
Salut Amin, merci pour l’intérêt, je suis donc Romain Molina, journaliste, auteur. J’ai fait divers enquêtes pour divers médias « The New York Times », « BBC » ou « CNN ». J’ai publié six ouvrages dont les biographies autorisées d’Edinson Cavani et d’Unai Emery. J’ai été traduit en Uruguay, en Espagne, en Angleterre et en Russie. J’utilise le football comme un objet de recherche à 360° : social, culturel, politique, géopolitique, criminel même, et que sais-je encore.
Ton avis sur Peter Lim ? Traine-t-il des vieilles casseroles derrière lui ? Des cas de corruptions, des gestions louches ?
Peter Lim c’est… (rires)… Peter Lim. Il y a beaucoup beaucoup à dire. Entre ses relations folkloriques, sa carrière aussi de businessman qui est quand-même assez connue, ses divers investissements à travers le monde… Il Faudrait faire un spécial Peter Lim ne serait-ce que sur son business. Par contre ce qui est très intéressant, c’est la manière dont il est rentré dans le football, comment il gère le foot et avec qui il est ami. Par exemple, c’est un excellent ami de Nasser al-Khelaïfi et de beaucoup de personnes autour des droits TV aussi. Il a énormément de connaissances dans ce monde-là. Ce qui est intéressant vis-à-vis de Peter Lim, c’est pourquoi il a des relations avec certains propriétaires de club. Tu remarques que dans les transferts de Valence, oui Mendes est présent, mais il est parfois aussi question des amitiés de Lim avec d’autres propriétaires ou directeurs sportifs. Donc, c’est assez intéressant de voir que tous les choix de Valence ne sont pas des choix sportifs mais des choix dicté par le réseau de son propriétaire.
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— Romain Molina (@Romain_Molina) October 18, 2020
Durant la dernière période de transfert Jorge Mendes a pris un poids important dans les décisions mercato de Valence, qu’en penses-tu ?
Je sais pas quand exactement Mendes et Lim ont commencé à se connaitre. Mais pour Mendes, Valence c’est vraiment la maison. Aujourd’hui c’est l’un des clubs-relais qu’il utilise le plus, alors évidemment on peut aussi noter Wolverhampton, parce qu’il est en lien avec les patrons du club anglais. Mais aujourd’hui, Valence a une place forte pour lui. En fait, il se sert de Valence comme tremplin pour d’autres joueurs. Il est intéressant de voir que Mendes n’a aujourd’hui plus autant de joueurs sous son aile. Aujourd’hui, il ne s’occupe plus des meilleurs joueurs comme avant, même s’il a encore des très bons joueurs évidemment.
Sur le Portugal, il est incroyable, il a même réussi à se rabibocher avec quasiment tout le monde ce qui n’est pas facile. Mais à l’heure actuelle, Mendes est avant tout un agent de club plus qu’un agent de joueur. Un peu à l’image d’un Bayat en Belgique, car il a une situation de presque monopole sur la Belgique. Souvent, Des clubs en déficit l’appellent car il est capable de ramener des joueurs d’autres clubs, c’est exactement ce que fait Mendes.
Valence est directement impliqué avec des clubs aussi de la galaxie Mendes. Il y a des négociations avec des joueurs de Wolverhampton, je ne serais pas étonné de voir 2-3 mouvements vis-à-vis de l’Atlético… Bref, tout tourne autour d’un cercle très restreint, on peut parler de Guedes aussi quand il arrive avec Nasser al-Khelaïfi. Au club de Valence, en terme de business, tout gravite autour de quelques hommes autour de Peter Lim. Je me rappelle en avoir parlé avec quelqu’un de la cellule de recrutement de Valence qui me disait « on sert à rien, on travaille uniquement avec agents » Aujourd’hui , c’est un fait, le club travaille uniquement avec agents.
Est-ce que la situation actuelle du VCF te fait penser à celle de Malaga il y a quelques années auparavant ?
Globalement la situation de Valence, qui est dramatique, plein de clubs la connaissent. On peut aussi se rappeler le Deportivo. Tu parles de Malaga, mais c’est différent. Malaga est vraiment un cas à part puisque tu as un propriétaire qui arrive avec de l’argent, qui est intéressé par la Marina (grand complexe résidentiel très touristique), les politiques le bernent bien et des gens au club le prennent pour un pigeon. Là aussi, on a eu une gestion scabreuse… Tout a été scabreux, des mecs autour de lui jusqu’aux gens du club. Malaga, c’est un grand braquage comme Auxerre en France avec le propriétaire chinois. Il y a eu pareil à Elche ou encore Cordoba aussi. Mais ici, c’est dramatique et flippant parce qu’on parle de Valence qui est un géant du football espagnol. Mais malheureusement aujourd’hui, c’est la situation du football moderne. De nombreux propriétaires sont comme ça.
A Valence, aucun choix n’est sportif, il serait intéressant de découvrir les accords qui existent réellement derrière tous ces deals. Et malheureusement un tel travail prendra beaucoup de temps. Je suis pour le moment sur pleins d’affaires, je n’ai pas le temps de traiter Valence en détail comme j’aimerais. Mais en effet c’est super intéressant mais c’est aussi extrêmement flippant. Le cas de Valence me fait surtout penser à la Corogne , mais avec quand même une différence : Il n’y a pas que Mendes à Valence, tu as aussi Peter Lim. Tu as des gens autour de lui et même des gens qui sont ne sont pas du monde du foot qui influencent parfois les décisions du club, notamment des gens des droits TV.
As-tu un joueur du club ancien ou plus récent qui t’as particulièrement marqué ?
J’ai toujours été un grand admirateur de David Silva mais ça remonte un petit peu. Je crois que c’est l’un des joueurs les plus esthétiques et intelligents que j’ai vu ces quinze dernières années. On parle très rarement de Silva, même quand il était à City et qu’il brillait comme pas possible. Peut-être parce qu’il était pas flashy ou que sais-je, mais c’était un joueur magnifique. On pourrait aussi parler de Mata bien évidemment. C’est une époque où plusieurs joueurs sont montés, mais j’ai une tendresse pour David Silva, je trouve que c’était un footballeur qui était un peu à part.
Et enfin, ton nouveau livre « The beautiful game » est sorti il y a quelques semaines, de quoi traites-tu à l’intérieur ?
En effet, j’ai sorti « The beautiful game » (édition Exuvie) il ya de ça plusieurs semaines. J’y parle foot, guerres et politique. Des footballeurs face au destin, histoire de montrer que c’est plus que du foot, que ce n’est pas simplement des mecs en train de courir derrière un ballon. J’en parle pour montrer évidemment que le football est un objet de pouvoir mais qu’il aussi parfois dangereux. Ce livre aborde en fait les grandes histoires et grands destins de joueurs et d’entraineurs à travers le monde. Je me suis servi du foot comme un objet à 360° dont politique, historique, culturel, social… Ce sont surtout des destins que je suis allé retrouver ; des capitaines, des anciens internationaux, des sélectionneurs ou encore des espoirs. C’est un contenu propre qui part du Yémen en terminant en Afghanistan avec par exemple le gardien ergothérapeute Ovays Azizi. Je dirais que c’est avant tout un livre tragique, car oui, il y a beaucoup de tragédies et de drames. Ce livre est comme une ode à un football dont on ne parle pas assez et qui mérite pourtant toute notre attention. Le football est rempli d’histoires incroyables humaines, parfois tragiques certes, mais toujours grandes.
Valencia-Sports remercie Romain Molina pour sa disponibilité.
Amin Ziane
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Photo mise en avant via www.dicodusport.com
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